Florent, 32 ans, a souffert d’addiction à la pornographie pendant quinze ans. Aujourd’hui marié et père de deux enfants, il raconte dans Avant j’étais accro au porno les longues années de souffrance, mais aussi de combat, pour sortir de cette dépendance taboue et invisible.
« J’avais 11 ans lorsque j’ai vu pour la première fois des images pornographiques. C’est arrivé par erreur, à la suite d’un enregistrement d’un soir qui avait duré plus longtemps que prévu. J’ai regardé la cassette jusqu’au bout et je suis tombé sur ce film érotique. Des scènes de sexe ouvertement filmées, sans gros plan, mais explicites. J’étais seul, et ces images m’ont fasciné. J’ai rangé la cassette et régulièrement, je la ressortais pour la regarder à nouveau. À partir de ce moment-là, mon attirance pour ces images n’a cessé d’augmenter. Et la facilité avec laquelle Internet me permettait d’assouvir mon besoin n’a rien arrangé.
Au lycée, je ne me contrôlais plus
Vers 15-16 ans, ma consommation est devenue réellement addictive. J’ai commencé à perdre le contrôle, à faire des choses si stupides que j’ai du mal à en parler aujourd’hui, tant elles me font honte. J’avais des pratiques masturbatoires incontrôlées : n’importe où, n’importe quand. Tout support pouvait devenir prétexte à une excitation, et donc à une masturbation. Ce n’était plus un plaisir mais un simple réflexe mécanique. Ça aurait d’ailleurs pu avoir des conséquences terribles. J’ai appris depuis que chez de nombreux porno-dépendants, la masturbation compulsive peut être la cause de troubles érectiles : incapacité à avoir des érections, éjaculation précoce, troubles de la libido, entre autres.
À 24 ans, j’ai rencontré celle qui est aujourd’hui ma femme. Les choses ont alors été encore plus compliquées à gérer. Lors de nos rapports sexuels, ma compagne était toujours masquée par ces images qui me hantaient, m’obsédaient. Mes fantasmes étaient tournés vers le porno et je le vivais mal. Je n’avais pas envie de cela mais je ne savais pas comment faire autrement. Je ne pouvais pas faire autrement. Il m’arrivait même de me refuser certaines positions ou pratiques parce que je ne pouvais pas me défaire des images qu’elles convoquaient en moi. Mon corps était là, mais ma tête était régulièrement ailleurs. Je ne supportais plus de lui mentir, je sentais que notre lien et notre complicité en pâtissaient, et j’en souffrais.
Seule ma femme avait les mots de passe
Quelques mois après le début de notre relation, j’ai fini par lui avouer la vérité. J’avais besoin d’être transparent envers elle. Avec le recul, je pense qu’il y avait aussi une forme d’appel au secours derrière mes aveux. Ça été le premier déclic sur la voie, longue, de la guérison. Ensemble, nous avons mis en place des filtrages web : des systèmes de contrôle parental dont elle seule avait les mots de passe. Ça a été une grande étape. Je savais que si je perdais le contrôle, il y avait cette barrière, cette béquille. Mais aussi la possibilité d’en parler avec elle.
Quand les pulsions étaient trop fortes, j’avais toujours le moyen de trouver des images ailleurs. Dans ces cas-là, je lui demandais les codes et je colmatais les brèches dans le système pour m’empêcher l’accès à celles-ci et gagner ainsi en liberté.
Ce soutien était une aide énorme mais ce n’était pas encore suffisant.
J’ai trouvé un autre moyen de « me faire du bien »
Quelques années plus tard, elle est tombée enceinte. Je n’étais toujours pas sorti d’affaire. Après sa grossesse, nous avons tous les deux eu envie de perdre du poids. Le fait de l’accompagner dans sa démarche m’a donné une occasion de la soutenir, tout en faisant quelque chose pour moi. On s’est tous les deux mis à suivre le même régime. Rapidement, je me suis surpris à être de moins en moins attiré par le porno, à avoir de moins en moins de pulsions incontrôlables, d’envies irrépressibles. Je craquais de moins en moins souvent. Comme si la perte de poids m’apportait un équivalent au porno dans ma quête de récompense, de bien-être.
Comme si j’avais remplacé la spirale « porno – masturbation – jouissance » par « régime – équilibre de vie – jouissance ». J’avais trouvé un autre moyen de me faire du bien. D’autant que le régime que nous suivions n’était pas ultra restrictif. C’était un régime équilibré, qui respectait le plaisir de se nourrir. Un régime très frustrant aurait d’ailleurs pu avoir l’effet inverse et me faire compenser en plongeant encore plus profondément dans l’addiction...
Progressivement, j’ai retrouvé de l’estime de moi, de la confiance en moi, et j’ai complètement décroché. Pas moins de quatre ans après l’installation des premiers contrôles parentaux... mais sans aucune autre aide que celle de ma femme et ma propre volonté.
J’évite toute sexualité solitaire
Aujourd’hui je pense pouvoir dire que je suis guéri. J’ai appris à gérer mes pulsions, et s’il peut m’arriver d’avoir l’envie fugace d’aller regarder des images pornos, ça passe très vite et je ne me laisse plus déborder. Ça n’a plus rien de comparable avec l’effort incommensurable que cela me demandait avant. Et comme pour un fumeur à qui l’on déconseillerait de refumer ne serait-ce qu’une cigarette pour ne pas replonger, je m’interdis de regarder la moindre image pornographique. De toute façon, 99% du temps, je n’en n’ai pas envie et je trouve cela ridicule.
Parce que la masturbation fait appel aux supports mentaux, aux fantasmes, et que ces derniers me ramènent inlassablement au porno, je m’interdis aussi d’avoir une sexualité solitaire. De peur que la masturbation puisse me faire retomber dans l’addiction. Je ne dis pas que tous les porno-dépendants doivent s’astreindre à cette même abstinence pour décrocher, mais pour moi c’est nécessaire. D’ailleurs, j’en ai complètement perdu l’habitude. Je ne milite pas pour la censure de la pornographie. Je ne milite pas contre la masturbation. Je veux juste alerter sur les écueils du porno et aider les personnes qui n’arrivent pas à s’en défaire alors qu’elles le souhaiteraient.
En somme, je cherche à aider ceux qui souffrent de cette addiction - comme ce fut mon cas - à reprendre le contrôle d’eux-mêmes. Rien de plus.
Avec psychologies.com
1 Commentaires
Anonyme
En Mars, 2017 (16:10 PM) merci pour votre aide.cela me réjouit de savoir que vous avez pu décrocher kan moi je me bat encore pour m'en sortir.
Merci pour votre témoignage
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